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Par Sarah Braun
13 févr. · 3 mn à lire
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Un jour, ma fille a disparu dans le nuit de mon cerveau, Stéphanie Kalfon

"Ainsi commence la descente aux enfers de cette famille. Alors que tout viendra conforter l’idée que Nina est bien leur fille, Stéphanie Kalfon nous fait voir la réalité d’Emma, convaincue que sa fille est restée quelque part aux alentours de cette maudite fête foraine et que la « petite fille » qui vit chez elle n’est en aucun cas la sienne."

Mon enfance est peuplée d’histoires de disparitions d’enfants dans des fêtes foraines. Légendes urbaines ou tendance un tantinet perverse des mes grand-mère et arrière-grand-mère, je n'ai pas la réponse. Ce que je sais en revanche, c'est que le motif de la fête foraine m'évoque instantanément la peur depuis. Si je vous parle de cela, c’est parce que c’est dans une fête foraine que débute notre histoire. D’emblée ma gorge s’est serrée. Ce récit à bout de souffle m’a tenue en haleine - entre effroi et stupéfaction - jusqu’à la dernière page.

C’est l’automne et Nina a huit ans. Pour fêter cela, ses parents Paul et Emma (la narratrice) décident de l’emmener dans la fête foraine de leur village, située sur le parking d’un hypermarché, bien calée entre une petite forêt et un chantier. Paul décide de tirer à la carabine, Emma l’encourage. Petit moment d'exaltation familiale. Lorsqu’ils se retournent, la petite a disparu. La ferveur se mue alors en horreur. « Je cours, j’appelle, je nage à contre-courant dans la foule électrique, je traverse des fêtes de bruits, de jambes ou de bras hirsutes, des gueules indifférentes ou horrifiées, des visages laids, gras, suivants, avec leurs yeux en forme de boules à facettes. Partout surgissent des monstres, des gens maquillés de rires exagérés, leur voix Larsen m’engloutissent… ils ne se poussent pas, les gens, ne me répondent pas, ils restent agglutinés en file indienne devant le train fantôme, ils veulent leur ticket pour le grand divertissement, mon coeur tremble tel un mauvais alcool dans le fond d’un verre, je les harangue et j’implore. » (p. 12) La police est appelée, une battue est organisée, Emma et Paul sont priés de rentrer dans leur appartement où est encore accroché la joyeuse banderole « joyeux anniversaire ».

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